Un Ancien Pirate au Service de l'Etat !
Après la libération des ondes, les acteurs du monde des radios libres ont colonisé les ondes et les studios, certains poussant le paradoxe jusqu’à entrer dans le service public. Comment expliquer ce renversement des rôles ?
Quand Jean-Marc de Félice lance avec Jean di Sciullo, en 1977, Radio Flip (Front de libération de l’information par la parole), le seul culot de transgresser ne suffit pas, il faut aussi de l’inventivité. Pour échapper au brouillage, de Félice met au point un émetteur qui déplace lentement son émission sur le spectre de la FM, si bien que la station publique FIP finit par être brouillée elle-même. Tel est pris qui croyait prendre ! Tant que les émissions sont sporadiques, ce subterfuge suffit. Mais les radios libres prennent de l’ampleur sous l’impulsion de jeunes gens motivés, mais également de groupes politiques. La diffusion en continu est donc un défi à relever. De Félice met alors au point un réseau d’antennes reliées par téléphone et un système d’écoute pour surveiller les autorités qui rôdent autour. Ainsi, quand une patrouille s’approche d’un des émetteurs, l’émission est transférée sur une autre antenne.
La fin du monopole ne sonne pas la fin de l’activité de ce jeune technicien, bien au contraire. À travers la France, les ondes sont prises d’assaut. Les techniciens, encore peu nombreux, sont très sollicités et de Félice n’est pas en reste. Mais une nouvelle demande surgit bientôt : celle des télévisions. Il met alors de côté sa passion pour la radio et participe à la mise en place du réseau de Canal+, de la (défunte) Cinq et de Canal J. Son retour à la radio en 1992 se fait cette fois par la grande porte : pas moins que la direction technique à RFI pendant quatre ans, puis la direction technique à RTL!
Son entrée en 2002 à Radio France semble dès lors logique. Face au défi de la numérisation, la radio publique a besoin d’un fin connaisseur des réseaux, des émetteurs et des studios mais surtout de quelqu’un d’imaginatif et d’ingénieux pour trouver des solutions adaptées. Car le numérique chamboule non seulement les outils techniques, mais également l’organisation des radios. Aujourd’hui, Radio France peut se vanter d’être une radio créative et moderne ; et c’est sans doute aussi grâce aux anciens des radios libres que la passion de créer et d’enrichir ce média s’épanouit dans le service public. M.C.
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